CANICULE ET CHALEURS EXTRÊMES COMMENT S'Y ADAPTER

Moulin de Trézelles  - Allier

Quand il fait très chaud, mieux vaut limiter toutes les activités physiques facultatives (sport, jardinage, bricolage) et les reporter aux heures les plus fraîches. Si ces activités sont obligatoires, dans le cadre du travail par exemple, restez à l'ombre. Pour vous rafraîchir, n'hésitez pas à prendre des bains ou des douches fraîches, sans vous sécher ! Vous pouvez aussi utiliser un brumisateur sur tout le corps. Si la chaleur devient insupportable à la maison, il est conseillé de passer quelques heures dans des endroits climatisés, comme les grandes surfaces ou les cinémas.

L’appétit s’adapte tout seul

Faut-il privilégier glucides ou lipides, eau gazeuse ou plate, fromage ou dessert? A chaque épisode caniculaire, c’est la foire aux conseils – pas toujours avisés. Marie-Paule Depraz-Cissoko, diététicienne au CHUV, a une approche plus simple: «Mangez ce qui vous plaît.» Bannir les aliments gras? Inutile, «leur digestion ne génère pas plus de chaleur» que les autres. Les produits laitiers? Au contraire: «Un yaourt, c’est 70 à 80% d’eau; idéal pour ceux qui n’aiment pas les légumes.» La diététicienne prévient tout de même qu’il ne faut pas trop manger, un repas copieux «demandant beaucoup d’énergie pour être digéré. Mais l’adaptation vient naturellement: la température corporelle, la perte d’électrolytes [sels minéraux, ndlr] et la fatigue contribuent à diminuer l’appétit.» Surtout, il faut veiller à bien s’hydrater, y compris via les aliments, qui «doivent apporter jusqu’à un litre d’eau par jour. La seule chose à éviter: les boissons alcoolisées ou sucrées qui déshydratent l’organisme.» 

 

Pourquoi nous décourage-t-on de faire du sport lorsqu’il fait chaud? A cause du risque d’hyperthermie, qui peut s’avérer mortelle, répond Gérald Gremion, médecin du sport au CHUV. A l’effort, le corps travaille dur pour éviter la surchauffe: «Les trois quarts de l’énergie dépensée le sont pour évacuer la chaleur», dit le médecin. Très coûteuse en énergie à température normale, la tâche devient mission impossible lorsque le mercure bat des records. Résultat: la chaleur ne s’évacue plus et la température corporelle augmente. Passé 40°C, c’est le «coup de chaleur», qui peut provoquer des lésions cérébrales fatales. 


Il existe toutefois des astuces pour contrôler sa température, notamment avec ce que les professionnels appellent la convection: «Le sang se dirige vers la peau et se refroidit avec l’air ambiant puis repart donner de la fraîcheur dans le reste de l’organisme», explique Gérald Gremion. Problème: cela ne fonctionne que si l’air est à moins de 37°C. En cas de grosse chaleur, on peut mettre de la glace en contact avec la peau, toujours dans le but de refroidir le sang. Mais le mieux est encore de rester tranquillement au repos. Les performances sportives sont de toute façon amoindries par la chaleur, «parce que nous n’avons pas assez de sang pour satisfaire les besoins des muscles tout en contrôlant la température corporelle».



Le sommeil freine le corps


Les nuits torrides peuvent troubler le sommeil. Celui-ci dépend de l’horloge biologique, qui déclenche l’endormissement lorsque luminosité et température externe baissent. Celle du corps doit alors s’abaisser entre 36,4° et 36,2°C. «Mais lorsqu’il fait très chaud, ce refroidissement se passe moins vite», dit José Haba Rubio, médecin du centre du sommeil au CHUV. 


De plus, les humains étant des animaux homéothermes, donc gardant une température corporelle quasi constante, l’organisme use de mécanismes standards pour évacuer la chaleur superflue, tels que la transpiration (comme dans le sport) ou la vasodilatation des vaisseaux sanguins des extrémités. «Or pendant le sommeil, ces mécanismes fonctionnent moins bien. Le corps évacue moins bien la chaleur, ce qui amène le cerveau à se dire qu’il y a un problème, et fait se réveiller la personne.»


Comment pallier ces dysfonctionnements pour mieux dormir ? «En se couvrant peu, en favorisant un couchage propice à la transpiration, en évitant le sport le soir ou en prenant une douche froide.» Mais rien ne sert d’ingérer des médicaments favorisant une vasodilatation générale dans le corps, telle l’aspirine.


L’humeur se dégrade 

La canicule influence-t-elle l’humeur ou le comportement? «C’est une intuition qu’ont nombre de scientifiques, mais aucune étude n’a clairement montré ce lien», dit Jacques Besson, chef du service de psychiatrie communautaire du CHUV. Avant d’admettre de possibles effets indirects: la fatigue à cause d’un sommeil difficile, la déshydratation et l’inconfort lié à la chaleur pourraient conduire à une plus grande irritabilité. «Quand les gens ont chaud, cela les rend irascibles et plus prompts à se mettre en colère, plus frustrés et plus impulsifs», confirme Solomon Hsiang dans un article de la revue Scientific American. 


En 2011 et 2013, cet économiste de l’Université de Californie a mené une analyse de 60 études dans divers domaines (économie, criminologie, géographie, histoire, psychologie); publiée dans Science, elle a montré que de hautes températures ou des climats extrêmes étaient très souvent liés à l’augmentation du caractère belliqueux, violent ou conflictuel entre des personnes ou des groupes. Que ce fût pour des raisons économiques et géographiques (déficit de pluies, sécheresse par exemple) ou sociales (agressivité dans le cercle privé).

Attention à l’effet de certains médicaments

Le mode d’action de certains médicaments peut être modifié lors d’une canicule. Ils peuvent, par leur fonction principale ou leurs effets secondaires, aggraver les symptômes observés lors des vagues de chaleur. Ainsi le Lasix, un anti-hypertenseur, a un effet diurétique qui va accentuer la déshydratation. Autre exemple, donné par Caroline Fonzo-Christe, pharmacienne aux HUG: «Certaines molécules prescrites pour soigner les migraines ont un effet vasoconstricteur qui retient la chaleur dans l’organisme.»


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